La réélection de Donald Trump soulève de nombreuses questions pour l’Afrique, d’autant que l’administration Trump a souvent démontré une vision transactionnelle, centrée sur les seuls intérêts américains. Pour les panafricanistes, ce retour représente un défi majeur mais aussi une occasion de réfléchir à l’autonomie politique et économique du continent. Alors que Trump revient au pouvoir, les dirigeants africains doivent anticiper un manque d’engagements multilatéraux et une approche minimaliste de la diplomatie qui laisse le continent en marge des priorités américaines. Cette posture transactionnelle – particulièrement marquée par un désintérêt pour les partenariats stratégiques comme l’AGOA – contraste avec les priorités panafricaines d’intégration économique et de soutien aux infrastructures critiques.
Diplomatie : un moment pour la solidarité africaine
L’approche froide et souvent désinvolte de Trump vis-à-vis des relations avec l’Afrique invite les gouvernements du continent à réévaluer la nécessité d’une diplomatie fondée sur l’unité panafricaine. Sous l’administration Biden, les États-Unis avaient tenté de réintégrer les nations africaines dans les dialogues mondiaux, marquant un respect croissant pour les enjeux locaux, notamment à travers les engagements de Kamala Harris en faveur de la jeunesse africaine. Avec Trump, cette coopération pourrait se retrouver marginalisée, et l’Afrique doit saisir cette occasion pour renforcer son réseau diplomatique indépendant et ses alliances intra-continentales, en partenariat avec des pays comme la Chine, la Turquie ou les BRICS, qui pourraient se montrer plus réceptifs aux besoins du continent.
Un recentrage économique panafricain : nécessité d’un modèle alternatif
En se concentrant uniquement sur des accords d’investissements directs, Trump a, dans le passé, réduit l’impact de politiques économiques d’envergure pour l’Afrique, qui soutiennent des secteurs comme les infrastructures, l’agriculture et la santé. Les panafricanistes voient cette approche comme une incitation à développer des modèles économiques indépendants, en tirant parti de ressources internes et en favorisant les échanges au sein de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF). Ce retour de Trump pourrait encourager les pays africains à s’affranchir de l’aide extérieure pour opter pour des partenariats Sud-Sud, stimulant ainsi une économie auto-centrée et résiliente face aux crises mondiales.
Sécurité et souveraineté : résister aux modèles d’intervention militaire
Sous Trump, l’approche militaire, particulièrement dans les régions comme le Sahel, a mis de côté le rôle des États africains en matière de sécurité. La vision panafricaine prône un modèle qui repose sur les capacités locales et les initiatives régionales en matière de sécurité, visant à bâtir une défense africaine unie, moins dépendante de l’appui extérieur. Si Trump revient avec une approche militarisée des relations sécuritaires, les États africains doivent s’orienter vers un renforcement de leurs propres mécanismes de sécurité, encouragés par des institutions comme l’Union Africaine.
Leçons et perspectives : vers une Afrique plus indépendante
La réélection de Trump met en lumière la nécessité pour l’Afrique de se défaire des modèles de développement extravertis. Cette indépendance doit se traduire par un engagement collectif dans des initiatives transnationales de développement durable, de sécurité énergétique et d’autosuffisance alimentaire, en minimisant la dépendance à des partenaires qui ne partagent pas les priorités africaines.
Ce retour aux affaires de Trump, bien que potentiellement déstabilisateur pour certains, offre une opportunité unique pour l’Afrique de s’affirmer comme un bloc indépendant et uni. Il s’agit là d’un moment charnière pour les panafricanistes et les leaders qui ambitionnent un continent fort et indépendant, préparé à affronter les réalités d’une économie globale incertaine.
Ismael Diouf / Business Africa